La fabrique de la bêtise : Bonhoeffer et l’effondrement moral de notre temps

Réflexion sur l’éducation moderne et l’ingénierie sociale

Une génération entière a grandi dans l’illusion que l’ignorance serait l’expression la plus pure de l’authenticité et que la honte de ne pas savoir équivaudrait à une forme d’oppression. 

Ces mêmes personnes, incapables de soutenir une conversation sérieuse sans interruption compulsive des notifications de leur téléphone, affichent pourtant des certitudes inébranlables sur des questions que la philosophie interroge depuis des millénaires. 

Ils connaissent chaque phénomène viral mais n’ont jamais entendu parler de Platon, ils réclament le respect sans en manifester les raisons, cherchent l’admiration sans construire de caractère et se persuadent que tout leur est dû sans rien offrir en retour.

Le théologien allemand Dietrich Bonhoeffer*, qui s’opposa au nazisme, avait écrit que la stupidité est plus dangereuse que la méchanceté. 

Il décrivait déjà le syndrome que nous observons aujourd’hui, une génération gâtée, et rendue intellectuellement paresseuse par design.

En effet, notre système contemporain a été méthodiquement conçu pour produire des êtres alphabétisés mais incapables de produire une véritable pensée.

Ce processus, que Bonhoeffer aurait pu nommer « bêtise artificielle », est une lobotomisation progressive et silencieuse, redoutablement efficace. Le système ne récompense pas l’originalité, il la punit, il ne cherche pas des penseurs, mais des répétiteurs d’informations prédigérées.

Le résultat est une génération qui confond les données avec la sagesse, l’information avec la connaissance, l’opinion avec la vérité. 

Pire encore, cette génération a été conditionnée à voir l’ignorance comme une vertu. 

Ne sachant pas, ils ne ressentent pas la honte qui pousse à apprendre, mais se glorifient d’être « authentiques », « anti-élitistes », « vrais ». 

La connaissance est reléguée au rang de prétention, la curiosité intellectuelle devient arrogance, et l’étude sérieuse, une perte de temps.

Cet anti-intellectualisme n’est pas un effet secondaire du système, il en est la finalité, car une population éduquée, au sens plein, est une population difficile à manipuler. 

Celui qui sait penser par lui-même déjoue la propagande et démasque les incohérences. 

C’est pourquoi le système moderne ne produit pas des citoyens et des consciences libres, mais des consommateurs et des opérateurs dociles. 

Bonhoeffer disait que la véritable menace n’est pas seulement la brutalité, mais l’acceptation volontaire de la bêtise et cette bêtise est aujourd’hui soigneusement cultivée.

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